lundi 24 octobre 2011

Carnet de bord de Fabian - Quito

 Apres 11 h d'avion, je revois le sourire pince de Marie qui ne s'est toujours pas faite aux atterrissages... Apres nous avoir demande au micro, en espagnol et en anglais, d'attacher nos ceintures, le pilote de l'avion serpente entre les montagnes et doit voler tres pres des immeubles pour atterrir a l'aeroport de Quito. Au bord de la piste gisent des avions decapites ou demembres qui servent sans doute de pieces de rechange pour les coucous panamericains. On a appris plus tard qu'il y a deux ans, un avion a fauche des immeubles de la ville, hauts perches sur leur colline...

Pour la premiere fois, nos sacs durent passer aux rayons X pour sortir de l'aeroport, "securite par rapport aux narcotraficants" ai-je pu lire sur un panneau d'explication de la police aeroportuaire. Dans la file d'attente, je regarde les gens : les touristes super equipes, chaussures de rando aux pieds ; les touristes "a valises" ; et les gens qui reviennent au pays avec plusieurs immenses valises contenant sans doute des cadeaux d'outremer pour leur famille. De par la porte de sortie, on en appercoit une, ballons a la main et sourires aux levres. Mon attention est attiree par un grand dreadu, une roulasse deja prete a la main. On le retrouve a la sortie de l'aeroport, il s'appelle Guillaume et vient de Suisse. Il voyage seul pendant trois mois. Il a deja reserve un avion en Bolivie pour son retour, a des centaines de km de la.

Il nous dit qu'il a repere une auberge. Comme on n'avait pas de programme precis, on a decide de prendre un taxi a trois pour se rendre au "Chicago Hostal", une auberge situee dans la vieille ville. On nous avait pourtant bien dit de ne prendre que des taxis jaunes officiels, mais notre chauffeur nous propose la course pour 10 dollars americains, et nous en prend finalement 12... Les Gringos debarquent ! Il faut dire que nous sommes un peu perturbes par la monnaie. Dollars americains ? Dollars equatoriens ? En fait l'Equateur a remplace sa monnaie (les Sucres) par le Dollar americain, suite a une grosse crise economique en 2000. Ils ont recupere les vieilles pieces de l'oncle Sam, et sur les billets on peut lire le traditionnel "In God we trust" de la reserve federale americaine. Peut-etre un jour a la Dexia, trouvera-t-on des Yens chinois... ? ;-)

L'auberge est tres charmante, et c'est un petit bonhomme a l'air sympatique qui nous accueille avec quelques mots en anglais. Il nous explique qu'il a plus facile en espagnol. Je parviens neanmoins a comprendre l'essentiel de ce qu'il a a nous dire. apres avoir vu notre coquette chambre, je monte a la terrasse collective ou je le retrouve expliquant a Guillaume differentes choses sur Quito et ses environs. A 60 km de la metropole de 2 000 000 d'habitants s'erige le volcan (encore en activite !) de Cotopaxi, qui a quand meme ete en eruption plus de 10 fois, detruisant Lataguna, une ville satelite de Quito, plusieurs fois. Heureusement pour les habitants, il est calme depuis 1904...

Juste devant nous, une grande tour abandonnee est encore une relique de l'ancienne economie equatorienne, quand la monnaie etait encore le Sucre et que les banques se portaient bien. L'immense batiment, aui appartenait a l'une d'elle, n'a jamais servi.

A notre gauche, un ange semble veiller sur la ville (El Panecillo), meme si Guillaume nous a confirme ce que notre petit guide nous disait : il est dangereux pour les Gringos d'y aller a pieds, mieux vaut prendre un taxi, il en a fait l'experience !

Notre auberge se situe tout juste a l'intersection de la nouvelle et de la vieille ville. A notre gauche, les batiments sont assez bas, tandis qu'a notre droite, de hautes tours brisent le ciel, comme pour concurrencer les montagnes. C'est assez frappant de remarquer la fracture sociale a ce point-la, mais nos virees a Quito nous reserverons d'autres surprises du meme acabi.

Les jours suivants, nous errons dans la ville et dans de grands parcs qui nous permettent de reprendre un peu d'oxygene nous manquant a cause de l'altitude et de la pollution.

Marie pose dans le parc de la Carolina


Dans les rues de Quito, mon attention est attiree par les nombreux grafitis, aussi bien pour leur graphisme que pour leur message politique.

Vous n'etes peut-etre pas si loin ???

Ca aurait pu etre du Banksy !


Afin de faire face au trafic des voitures et a la mauvaise qualite de l'air, chaque voiture de Quito a un jour de la semaine durant lequel elle ne peut pas rouler. Le jour depend du dernier chiffre sur la plaque d'immatriculation. Je me demande comment ils font pour les nouvelles voitures, qui durant leur premiere annee de circulation, n'ont pas de plaque... ("la police ca marche pas bien ici", dixit Gabriella, dont je parlerai plus tard)

Pour circuler dans Quito, le plus simple est de prendre le metrobus, un bus qui s'arrete a des stations fermees, et c'est a chaque fois dans un grand fracas qu'une petite passerelle permet de rentrer ou de sortir du bus. Dans un de ceux-ci, j'observe les gens autour de moi. Un quart des personnes est des indigenes Quechuas. Pour la plupart, on les reconnait a leur petite taille et a leurs habits traditionnels : de longues robes colorees pour les femmes et un chapeau typique pour les hommes, et bien sur un poncho bien chaud sur les epaules, et souvent un enfant accroche dans le dos. Il y a egalement quelques afro-equatoriens, sans doute une trace de l'esclavage, et un peu de blancs. La majorite est un mix de tout ca (appeles Mestizo). Les yeux bleus de Marie ne passent pas inapercus !

Une douce musique me sort de ma torpeur. Derriere moi, un aveugle, avec un manche a balais comme canne, chante d'une voix etouffee sur une bande audio. Quelques personnes lui donnent quelques pieces directement dans la main. Je fu tres emu par cette scene, et je me dis en meme temps que ca ne doit pas etre facile tous les jours d'avoir un tel handicap en Equateur.

Pourtant, l'Equateur a fait de gros progres sociaux, sous l'impulsion de Rafael Correa, au pouvoir depuis 2008. Gabriella, qui nous a heberges quelques jours a Quito, nous a explique qu'il avait fait l'inventaire de toutes les personnes handicapees, dans les villes autant que dans les campagnes, etant lui meme (je pense) handicape. Il paraitrait qu'il soit venu faire ses etudes en Belgique, et que ce soit la qu'il ait rencontre son epouse.

Il existe aussi, depuis peu, une sorte d'assurance chomage de 3 mois pour les personnes ayant travaille 1 an (sous contrat de travail...). Apres, c'est la debrouille, comme en temoigne le nombre de marchands ambullants vendant tout et n'importe quoi dans la rue, et dans les transports en commun : chocolat, toutes sortes de maïs (il en existe au moins 3 sortes tres differentes, a ma connaissance), journaux, cacahuetes, fruits frais (delicieux !), hot-dogs, boissons, telecommandes, fleurs, clopes a l'unite, sucreries, et parfois, au coin d'une rue ou a l'auree d'un parc, des charbons ardents grillent des brochettes de viande ou des bananes plantin (mmmmmm !).

Les bons fruits qu'on peut trouver toute l'annee !


On ne sort pas beaucoup le soir, les rues de Quito sont reputees peu sures pour les touristes. Le guide que nous avons achete a Londres y consacre un chapitre entier. Gabriella, que nous avons rencontree grace au CouchSurfing, ne nous rassure pas sur ce point-la : "la nuit, c'est tres complique pour la securite" ne cesse-t-elle de nous repeter dans son francais tinte d'un accent espagnol. Pour sa part, elle vit dans un clos residentiel avec un garde a l'entree qui surveille toutes les allees et venues, et le terrain est encercle d'une cloture electrique ou des affiches jaunes avertissent les eventuels voleurs : "peligro cerco electrico".

Le clos residentiel chez Gabriella, entoure d'une cloture electrifiee


La premiere fois ou nous avons rencontre Gabriella, nous avons marche jusqu'a un grand centre commercial pour y manger une "panada con queso" (sorte de crepe refermee avec a l'interieur du fromage), une "panada con verde" (toujours la crepe refermee mais avec de la banane plantin), et une "colada mojada" (une boisson chaude a base de fruits, accompagnee d'un petit bonhomme en brioche, qu'on mange normalement le jour des morts).

Colada Mojada


Je tombe des nues en debarquant dans ce lieu tellement similaire a ceux que j'aime si peu frequenter en Belgique. La, plus de Quechuas et de vendeurs ambulants, les gens sont habilles en chemises et en t-shirts de marque, et de la musique en anglais resonne dans la galerie. Boutiques de luxe, PC, GSM, televisions a ecrans plats, ... tout le confort occidental s'y retrouve. Mais ce n'est sans doute pas tout le monde, avec un salaire minimum de 260 $ qui peut se le payer (les prix sont les memes qu'en Belgique!).

Gabriella semble etre de la classe moyenne superieure, comme en temoigne son appartement assez luxueux et sa Chevrolet 4x4. Elle travaille dans un institut gouvernemental de recherches geologiques, le projet sur lequel elle est pour le moment consiste a faire des cartes pour les personnes aveugles.

Gabriella et nous, dans le parc Metropolitano


Elle parle relativement bien francais, ayant de la famille en France et a Bruxelles. Elle nous adresse tout de meme de temps en temps la parole en espagnol pour qu'on apprenne. Gabriella nous a beaucoup appris sur la vie a Quito, et en Equateur en general. Une superstition equatorienne a laquelle elle croit est de ne jamais poser son sac a main par terre, sous peine de n'avoir jamais un portefeuille rempli !

Je suis tres content de quitter un peu les pots d'echappement pour aller a La Mitad Del Mundo (La moitie du monde), un lieu touristique situe a environ 1h de bus de la ville. En chemin, nous nous perdons avec Marie dans un petit marche couvert, ou on prendra un cafe en compagnie d'un cochon grille. La, pas beaucoup de Gringos, vous imaginez bien !

Fabian, son cafe, et son cochon !


La Mitad Del Mundo consiste en un edifice, surmonte d'une grande sphere, situe sur la ligne de l'equateur, au milieu des 4 points cardinaux. Tous les touristes font la meme photo, une pied de chaque cote de l'equateur.

Fabian, sur la "fausse" ligne de l'equateur


La scene est encore plus rigolote quand on apprend, lors d'une visite d'un musee en plein air a 300m de la, que la veritable ligne d'equateur n'est pas sous cet edifice ! La technologie d'un GPS a permis de contredire la croyance des colonisateurs de l'epoque, et de situer "correctement" la ligne de l'equateur passant par le musee "Solar Inti Ñan" (la ligne du soleil).

La "vraie" ligne de l'equateur (selon GPS)


J'y ai appris enormement de choses sur l'astronomie particuliere de la region, ainsi que sur la culture des indigenes de la foret amazonienne. Il faut savoir que, sur la ligne de l'equateur, le soleil se leve a 6h, et se couche a 18h, et ce tous les jours de l'annee. La moitie de l'annee, il brille a l'ouest, et l'autre moitie a l'est. Sur le coup de midi, quand on est exactement sur l'equateur, on n'a pas d'ombre, le soleil etant a la verticale. Nous avons egalement pu faire quelques petites experiences assez surprenantes, demontrant l'attraction terrestre verticale a cet endroit-la, ainsi que le sens de rotation de l'eau inexistant sur l'equateur. J'ai bien apprecie les elements de la culture amazonienne qui m'ont rappele mes cours d'anthropologie, et notamment que les defunts sont enterres dans l'idee que la mort est un passage vers autre chose. Ils sont donc positionnes comme un foetus, dans une jarre, accompagnes de tout ce qui pourrait leur etre utile dans l'au dela : bijoux, pots, armes, et aussi femmes et enfants (enterres vivants !).

Sepulture, indigene enterre dans le ventre de la Pachamama

Veritable tete reduite... brrr ! Les indigenes faisaient ca avec leurs ennemis, ou avec les personnes puissantes, pour garder leur force spirituelle.


Finalement, dans le bus pour partir de Quito et aller vers Montañita (une plage hippie dans le sud du pays), je me dis qu'on a eu de la chance : on ne s'est pas fait voler, notre avion ne s'est pas ecrase, et le volcan ne s'est pas reveille. Je pense a la philosophie de Konstantin, un voyageur russe qui se fait 777 jours en stop autour du monde : "Don't think about problems and they won't come !".

Le chapeau de Konstantin temoigne de son periple deja long !

1 commentaire:

  1. coucou vous deux,

    Nous venons de parcourir votre carnet de bord avec plaisir.
    Vous avez l'aire comblé de votre voyage ce n'est qu'un début bien commencé.

    Nous vous embrassons bien fort

    Marraine et Valérie (la scripte lol ;))
    sans oublier Angelina Victoria Jr et Ben

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