samedi 12 novembre 2011

Carnet de bord de Fabian - Baños

"Conserver la nature, c'est protéger ta vie"
C'est après un horrible trajet en bus économique qu'on arrive a Baños, alors que le jour commence a se lever. On trouve, dans la ville encore déserte, un hôtel où on parvient a négocier l'utilisation de la cuisine familiale. La ville semble assez petite et bordée de montagnes. On va se coucher pour quelques heures de vrai repos.

Baños est une citée réputée pour ses bains thermaux, grâce au pouvoir de l'eau volcanique du volcan Tungurahua. Celui-ci a pété violemment pour la dernière fois en 2006. Des notre arrivée, nous remarquons les plans d'évacuation de la ville, mais aussi la cascade de la Vierge, qui protégerait la citée du volcan depuis toujours.

La cascade de la Vierge
Les activités touristiques de la région se résument a des tours dans la jungle (assez proche), du canioning, de la location de vélos et de motos et meilleur marche : la marche a pied dans les immenses étendues verdoyantes de la région.

Marie aurait pu vendre des ballades touristiques, ou alors faire de la pub pour la sécurité routière !
Nature verdoyante et petit pont de singe dans les environs de Baños
Dans la montagne, ça et la, on peut voir l'une ou l'autre habitation de paysans, simplement faites de bois et de tôles. Autant j'avais été interpelle par le fosse entre les riches et les pauvres en ville, autant a Baños j'ai été frappe par la difference de mode de vie entre les citadins et les paysans. Ces derniers habitent plutôt dans la montagne et doivent monter et descendre de longs chemins escarpés plusieurs fois par jour pour aller de la ville aux champs, ou de la ville a chez eux. Leurs champs sont agrippés sur les flans de la colline et sont particulièrement en pente, alors que la ville a pris toute la place dans la vallée.

Baños vu du haut d'une des montagnes
Le travail des paysans doit être particulièrement éprouvant dans ces conditions. Ils cultivent des tomates, des avocats, des oignons rouges, des pommes de terre, et différentes sortes de maïs. Le soleil et la pluie d'Equateur font pousser également vigoureusement une quantité impressionnante de fruits. La maracuja (fruit de la passion), des petits citrons verts, des fraises, des melons, et bien sûr des ananas dont Marie raffole les jus. La majorité de ce qui est produit ici doit être vendu dans la localité. Certains paysans possèdent des pick-ups et vendent directement les fruits et les légumes dans la rue. On peut aussi en retrouver dans de petits magasins aux mille senteurs et couleurs.

Serres de paysans sur le flan de la montagne
On loue des vélos pour une journée afin de faire la route des cascades. Une magnifique escapade au travers des montagnes.

Marie sur son vélo
Fab dans l'orée de la forêt équatoriale, mais avec son casque de vélo, on ne sait jamais !
Pas si facile que ça la ballade a vélo dans les rochers !
On serre un peu les fesses quand on se fait doubler par de gros camions, mais le spectacle 100 pour 100 bio qui se dévoilait devant nos yeux en valait la peine. La vallée, qui s'étendait sous nos pieds, était entourée de multiples cascades de plus en plus grosses au fur et a mesure qu'on descendait le fleuve.

Première cascade rencontrée sur notre chemin
Et Fab qui essaye de faire de la concurrence a la cascade... ;-)
Nous n'irons pas jusqu'au bout de la route des cascades (qui faisait plus de 60km), nous nous arrêtons a la cascade, "El Pailon del Diablo". Celle-ci a été auto-proclamée, sans doute par les habitants du coin, la 8eme merveille du monde. L'eau claire filait a toute allure sur les rochers noirs et polis par le courant, puis se déversait a une vitesse vertigineuse dans des gorges pour aller s'éclater dans un fracas d'enfer sur les rochers en-dessous, où l'accumulation d'eau formait des petits bassins, avant de reformer plus loin une nouvelle cascade.
Les cascades Chin-Chin
Une autre des nombreuses cascades rencontrée (celle-la un peu plus petite, mais belle quand même !)
Des petites infrastructures en bambou, ou en métal rouille, permettait de s'approcher de très près d'El Pailon del Diablo, qui devait faire au moins 100m de haut. Un petit chemin, creuse dans la roche, dans lequel il fallait s'agenouiller pour avancer, donnait l'occasion d'aller derrière la cascade. On croise un Argentin qui, aussi ébahi que nous, disait qu'il n'avait pas de mots pour décrire cette démonstration de force de la nature. "Un bel endroit pour mourir", c'est tout ce qu'il a pu dire !

Fab derrière la cascade El Pailon del Diablo
El Pailon del Diablo (enfin juste un bout !)
Partout autour de nous, les grands arbres, la mousse, les lianes accrochées sur les falaises, et la forêt omniprésente, nous signifiaient bien qu'on était a l'orée de la forêt équatoriale.

Végétation aux alentours de Baños
Fleurs dont la couleur nous a impressionnes
Et oui Fab, c'est grand !
On passe quelques journées sportives a arpenter les nombreux sentiers et a profiter de l'air pur avant de se décider a se remettre en route. On va se boire un petit café, avec nos gros sacs a dos, a la Casa Hood, un restaurant tenu par un Gringo américain qui nous explique que la pluie, incessante depuis plusieurs heures, a provoque un éboulement et qu'il était donc impossible de prendre la route pour le moment. Une fois de plus, notre départ est donc retarde !

Petit pont improvisé par les locaux
Pont de singe entre deux montagnes
On passe une bonne partie de l'après-midi dans le petit resto sympathique, avant de partir a la recherche d'une nouvelle auberge. C'est Allan, un guitariste rencontre la veille alors qu'on jouait un peu de musique dans la rue, qui nous conseille un chouette petit hôtel pas cher. Il nous invite a venir avec lui le soir au Pipas Bar, un bar qui organise des concerts. On joue pour la première fois de notre voyage sur une bonne sono, devant un petit public enthousiaste. Le tenancier du bar, Raoul, était également musicos, et nous accompagne a la basse, tandis qu'un autre improvise sur des tablas. "Revenez demain, il y a des Argentins qui font du tango qui viennent, ça pourrait être chouette" nous dit avec insistance Nina, la compagne de Raoul. Voila comment on reste finalement une nuit de plus encore a Baños.

Fabian qui joue au billard au Pipas Bar
Alors qu'on fait notre petit set de musique avec Marie, on entend applaudir en français. C'était un petit gars, béret visse sur la tête, qui se payait des rhums avec un ami colombien. Il me tient la jambe pendant une longue partie de la soiree en me parlant de son voyage. Il a d'abord acheté un camion avec des potes, et organisait des projections de films dans les villages un peu recules. Ensuite, quand le camion est tombe en panne, il a acheté avec des amis un hôtel en Colombie pour pas cher. Ça ne rapporte pas un max, mais c'est assez pour vivre. "En France, je n'avais rien, je bossais comme un malade dans l'horeca pour trois fois rien, et pour des patrons insupportables. J'ai un peu mis d'argent de côte et la j'ai un petit capital que j'essaye de ne pas flamber." Son petit rêve sud américain réalisé donnait l'impression que tout était possible en Amérique Latine, avec un capital européen plus sûrement encore... "Ouais ici pour être tenancier d'un hôtel, tu mets ton nom a la commune, et c'est parti ! Pas des milliers de papiers et pas d'impôts." Mais pour Wayki, pour les musiciens, pour les artisans, pour les jongleurs, pour les vendeurs de produits de contrebande, pour ceux qui vendent des brochettes rôties dans la rue, pour les revendeurs de journaux, pour les taxi-motos, pour les vendeurs de chiclettes et de cigarettes a la pièce, pour les ramasseurs de bouteilles vides, pour les cireurs de chaussures, et pour bien d'autres encore, c'est une autre réalité... Tous ces plans débrouille, tous de l'économie informelle, font tourner la monnaie et permettent a chacun, au passage, d'avoir de quoi vivre un jour de plus. Il n'est pas rare que les enfants doivent travailler également pour subvenir aux besoins de leur famille.

Pour celui qui en a marre de lire, petite photo insolite...
Mais sans oublier de se laver les mains après !
On finit la soirée après que Nina, vers 2h30 du mat', les poches sous les yeux, demande amicalement aux musiciens de faire juste une dernière chanson avant de fermer boutique. On en fit deux, puis on laissa le petit couple couper les lumières et fermer les portes de cet endroit plutôt charmant.

Le petit groupe d'Argentins jouant du tango

En Equateur, 95 pour cent de la population est catholique, tout en conservant néanmoins des pratiques ancestrales. La ferveur des gens est impressionnante, et particulièrement en province comme a Baños. Les habitants de la ville sacrent principalement la Vierge Marie qui y aurait fait son apparition. De plus, elle aurait accompli dans la région de nombreux miracles : sauver les gens de plusieurs éruptions volcaniques, sauver des touristes dont la voiture était tombée dans un ravin, sauver des personnes tombées d'une nacelle avec un câble tendu entre deux montagnes, etc. Tous ces miracles sont représentés par des peintures dans l'église de Baños. 

Durant notre séjour dans la ville, nous avons été témoins de plusieurs processions de croyants, portant a bout de bras des statues religieuses dont le poids ne semblait pas léger, sous un soleil étouffant. Ils étaient accompagnes de musiciens et de porteurs de fleurs. 

Une de nos dernières ballades a été celle de la Vierge. Un long escalier, longeant la crête d'une montagne, permettait de rejoindre une immense statue représentant la Vierge et l'enfant Jésus. 

La statue de la Vierge au sommet de la montagne
La statue et le chemin étaient illumines, et tout au long de ce dernier on pouvait observer des reliques de certaines étapes du chemin de croix du Christ. Vu comme les escaliers montaient (pire que les marches de Bueren !), on peut comprendre pourquoi il est compare au chemin de croix. 

Les longs escaliers montant à la Vierge
Au sommet, plusieurs personnes avaient allume des cierges aux pieds de la Vierge, ou avaient inscrit une intention demandant une protection pour leur famille ou pour un monde meilleur...

Intentions inscrites sur le socle de la statue
Vue de la ville une fois près de la statue
Nous finissons par prendre un bus pour quitter Baños et retourner vers Quito.
Tu vois quoi mon chéri pour la suite ?

Carnet de bord de Fabian - Montañita le retour !

A un peu plus d'une heure de lá, on les retrouve, tous à leur poste dans une des rues des artisans, grands sourires aux lèvres, visiblement contents de la surprise de notre retour. Une "ambrassio" et c'est comme si on ne s'était jamais quittes. Le soir-même, apres avoir vendu un peu (premiere vente pour Marie qui a aide Wayki a tresser deux colliers), un grand feu de joie bercé par les vagues nous inspire à mettre du sable et du sel sur le bois de nos instruments pour jouer pour les etoiles, la mer, et les amis jusqu'au bout de la nuit.

Les retrouvailles avec Wayki et les autres artisans
Alors qu'on pensait se mettre en route pour Cuenca... un mal de dos fulgurant cloue Marie sur sa paillasse toute la journee. Sans doute un faux mouvement avec le sac a dos.

L'interieur de la cabane de Wayki
J'en profite pour aller dans la mer avec une petite planche de bodysurf pour gosses, qui detonnait dans la cabane de Wayki. Les grandes vagues m'engloutissent, me portent et me transportent. Je remarque que je peux faire plusieurs metres a toute allure quand j'arrive, comme les surfeurs, a me placer au-dessus des grandes vagues. A cet endroit, les grandes vagues se rabattent comme une bouche geante en faisant un bruit de monstre marin. L'euphorie marine me prit toute la journee. En fin d'apres-midi, alors que Marie gisait toujours dans la cabane, et que le soleil commençait a se coucher, je pataugeais tranquillement dans l'eau en attendant une grosse vague, quand un surfeur me dit quelques mots en espagnol que je ne comprends pas. Je lui dis que tout va bien, quand je me rends compte que je n'ai plus pied. La maree m'avait emmene plus loin sur la plage, et a cet endroit, les vagues ne me poussaient pas autant sur la côte. Je prends une grande respiration, et prends garde de ne pas paniquer, avant de commencer a brasser vers la plage. L'arriere des vagues me tiraient vers le large, me faisant perdre a chaque fois plusieurs metres. Je nage, je nage, calmement, en ayant une petite apprehension, quand je revois le surfeur a qui je fais un signe. Il m'invite a m'agriper a son pied, et avec sa planche beaucoup plus "aquadynamique", il me ramene sur la plage en me parlant en espagnol de courants et de requins... C'est avec les jambes flageollantes que je le remercie au moins dix fois, une fois arrive sur le sable. C'est la dernier fois que j'ai mis un orteil dans la mer d'Equateur.

On reste encore deux jours a Montañita, le temps que Marie se retappe, avant de prendre un bus pour Baños. Notre depart ayant, encore une fois, ete retarde, on oublie la visite de Cuenca. On dit a peine aurevoir a Wayki, sachant qu'il a un business a faire a Lima, et qu'on le reverra sans doute dans son Pérou natal.
Wayki fait une tresse dans les cheveux de Fab en attendant les clients

Carnet de bord de Fabian - Puerto Lopez



On se leve tôt pour aller a Puerto Lopez, un petit village de pêcheurs bien sympatique. Wayki fait le trajet avec nous, pour acheter du materiel : du corail. Apres une heure de bus, on arrive dans la ville. A la sortie du bus, un conducteur de taxi-moto a trois roues nous propose ses services. On lui explique qu'on cherche une "habitacion" (une chambre) pour pas trop cher. Il nous amene alors a quelques minutes de la, dans un hotel "avec salle de bain privee". A premiere vue, l'hotel n'est pas luxueux, mais bien suffisant pour nous deux. On s'empresse de deposer nos sacs pour foncer à la plage se baigner dans l'océan. Soleil d'Equateur à la verticale, sur le coup de midi... coups de soleils obligés ! Même pour moi, qui ai ainsi eu mon deuxieme coup de soleil de ma vie (le premier c'etait au Benin).

Taxi-moto a trois roues

L'hotel "avec salle de bain privee", s'averra être un buibui aux murs sales et suants. Sur ceux-ci gisaient ça et la des cadavres et des trainees de sang d'insectes, ainsi que des petits grafitis sur la peinture jaune ecaillee. Accrochee a un mur, une television ballotait sur son attache. La telecomande, a force sans doute d'être trituree par bien des mains moites, n'avait plus de chiffres sur les caoutchoucs. La "baño privado" repugnait Marie. Pour chauffer l'eau, un systeme electrique etait fixe a la sortie du pomeau, et les fils electriques q nu, qui pendaient au-dessus de la douche, n'etaient pas la pour rassurer.

Je rigolais bien de Marie et de son besoin de confort occidental, jusqu'a ce que le rideau pourri de la douche vienne se coller a ma cuisse, alors que je profitais de ce qui qurqit pu être une bonne douche. "Demain, on se barre d'ici !" se rassure-t-on avant de s'endormir.

Le lendemain, on trouve alors une auberge de rêve de Gringos, un peu plus loin sur la plage. Douches propres, chambres nickel, draps impec', internet, et surtout une vaste terrasse et plein de "bambouseries" (boiseries en bambou).

Auberge familiale a Puerto Lopez
La plage, l'auberge de cartes postales où je prends le temps de cuisiner, le soleil, Marie qui cherche des coquillages, les bars a cocktails dans la nuit, le sable fin, les vendeurs de ballades en bateau, tout ça me fiche paradoxalement le bourdon... Fut un temps, il fallait être un aventurier intrepide pour se lancer dans un tour du monde. Aujourd'hui, partout on trouve les mêmes Marlboro de Philippe, les hamburgers de Donald, dans le buibui le plus pourri une television pourra vous baver un film d'action d'Hollywood ou un clip denude d'MTV. Aujourd'hui, on peut trouver les fringues de même marque de sport partout. L'Empire est partout ! Le confort occidental semble toujours a portee de mains. A condition, bien sûr, d'avoir les moyens de se le payer, ce qui rend encore plus flagrante la fracture sociale entre les pauvres et les riches.

Une autre source de mon petit spleen tropical etait le business tournant autour des Gringos. La majorite des activites touristiques proposees sont des visites des iles avoisinantes. Puerto Lopez est connu pour l'observation des baleines. Nous n'en avons pas vues, etant donne que ce n'etait pas la saison, et que les tours en bateaux proposes etaient relativement chers. Mais il fallait se battre pour faire comprendre aux revendeurs de ballades en mer que nous n'etions pas interesses ! Nous etions un peu comme des poule a plumer, comme si notre peau claire (et oui un peu rougoyante) attirait les agents de touristes comme des requins. Tout ça manquait horriblement d'authenticite !

Agence de tourisme vendant d'une maniere originale ses tours en bateau (il faut lire ce qui est ecrit !)
Je sors un peu de ma misanthropie le soir, quand on decide avec Marie de jouer un peu de musique sur la terrasse de l'auberge. Rapidement, tous les gens de l'auberge se retrouvent comme une petite famille à ecouter ce qu'on pouvait faire sortir de nos instruments. Ca me faisait plaisir de voir que le patron de l'hotel, un bon-vivant bien en chair, et sa femme, une petite madame toute joviale, avaient l'air d'apprecier. On se fit offrir a manger, et des chaleureux echanges de sourires me redonnerent le moral.

Coucher de soleil lors d'une ballade le long de la plage a Puerto Lopez
On reste quelques jours sur place, et comme d'habitude quand on prend la decision de bouger, un evenement vient post-poser notre depart. Cette fois-ci, ce sont deux françaises qui nous proposent de les accompagner avec le fils du patron de l'hotel, faire un tour en mer avec le voisin pêcheur. On ne relechit pas trop longtemps pour se decider.

La vue du petit rafiot de Pirata
J'aime la mer, je pense au poeme de Baudelaire, a la tranquilite de cet espace qui parait infini. Du bateau, nous pouvons voir les endroits de la côte où la nature regne, etant impraticables par les humains. L'endroit est repute pour l'observation des baleines et des dauphins. Pirate, le voisin pêcheur, possede le plus petit bateau du port, sur lequel je ne pensais franchement pas qu'on pouvait flotter a autant (on etait 7 sur le rafiot !). L'eau gicle par dessus bord, nous faisant a chaque fois frissonner, jusqu'à debarquer sur une petite ile qui ne tardat pas etre rejointe par deux bateaux remplis de touristes, qui ont dû payer le prix cher.


Plage de Puerto Lopez, avec au loin un bateau de pêcheurs
 On reprend nos sacs laisses a l'auberge, et on repart sur Montañita dire aurevoir a Wayki et a nos amis artisans, avant de reprendre la route pour Cuenca et Baños.

Bateau mis a la mer par une bonne dizaine de pêcheurs (le travail a pris toute une journee !)

mardi 1 novembre 2011

Carnet de bord de Fabian - La cabane de Wayki

Le lendemain, alors que j'essaye desesperemment de me faire un petit cafe avec du bois humide sur la plage, un type, bandana dans ses cheveux longs, nous salue, intrigue par mon amas fumant de boites a conserve. Il nous propose, dans un espagnol tres comprehensible, de venir faire le cafe chez lui. Il habite dans une cabane sur pilottis installee sur la plage. Il a pour tout mobilier un lit entoure d'une solide moustiquaire. Longeant les murs, un tas d'ecorces de coco protege des bouts de corail sans doute destines a faire des bijoux.

La cabane de Wayki

C'est son boulot, il tresse a une vitesse impressionnante les petits bracelets colores qu'on peut voir partout sur les marches en Amerique latine. Il est Peruvien, mais a vecu quelques temps en Allemagne. Il a pris le temps de divorcer de ses deux femmes avant de trouver son modeste paradis sur son petit bout de plage a Montañita. Il a comme projet de faire un petit hotel et un restaurant sur la plage juste derriere sa cabane, mais comme il dit "piano, piano ...", petit a petit ...

C'est a la lumiere des bougies, dans cet espace confine de bambou, au'on joue de la musique jusqu'a la tombee de la nuit. En Allemagne, Wayki etait lui aussi musicien. Il semble beaucoup apprecier notre musique.
Effraye par le prix qu'on paye pour notre hotel, alors que nous etions si fiers de nous en sortir pour 5 dollars, il nous propose de venir dormir chez lui. Comme notre hotel etait deja reserve pour la nuit, on le remercie sans trop penser au lendemain.

Le 26 octobre, ca fait 9 ans qu'on est ensemble avec Marie. On arrive a le faire comprendre a Wayki dans notre espagnol approximatif. Il n'en revient pas, et nous offre a chacun un petit bracelet pour l'occasion.
Apres l'avoir quitte, on decide de se payer un petit restaurant dans le quartier Gringo pour notre anniversaire. On trouve une table dans un restaurant tout fait en bambou. Il y avait un match important a la tele : Quito contre Barcelone, deux equipes tres appreciees en Equateur. Le gardien degage la balle, on commande deux steacks avec de la salade et des patates ; un joueur attrape le ballon, et on nous apporte une biere et un coca ; il dribble, on nous apporte deja nos plats de Gringos ; et c'est la passe, je regarde Marie dans les yeux, il y avait moyen de trouver plus romantique ; il attrape la balle, et cest goal ! Toute la table derriere nous se leve en faisant un tonere de bruit. Balle au centre, petite passe, je finis mon assiette et aide Marie a faire de meme, sauce aux champignons de Paris. Sortie, controle de la tete, on finit nos verres, la table deja debarrassee, et on se met hors-jeu en allant se coucher tot, et en se disant que si lendemain le soleil n'est toujours pas la, on va le chercher !

Wayki et Marie


On retrouve Wayki le lendemain au marche, rodant pres de son petit etal sur le trottoir a cote d'autres vendeurs. Wayki nous explique qu'ils sont comme une petite communaute ou chacun veille sur l'etal des autres quand le vendeur doit s'absenter. Et tout le monde connait les prix des bijoux et autres produits d'artisanat. Ils achetent des bouteilles d'alcool ensemble et se partagent tout ce qu'ils amenent dans la rue : clopes, bouffe, jus de fruits, cocktails, biere, tout tourne dans les mains de tout le monde. Il faut dire que ca n'a pas l'air de rapporter enormement en cette periode peu touristique, mais tout juste assez pour vivre une journee de plus. Je pense que ca doit etre impossible a faire tout seul.

Les marchands d'artisanat solidaires

Nous disons aurevoir a Wayki, le soleil n'etant toujours pas de la partie. Il a l'air decu, et nous repropose de venir dormir dans sa cabane. De plus, il nous deconseille de partir si tard dans la journee, mais plutot en matinee. Le pari est lance : si demain il y a du soleil, Marie doit payer une biere a Wayki ; s'il n'y en a pas, il lui payera un mojito.

Marie apprend aupres de Wayki des nouvelles techniques pour faire des bracelets, pendant que je joue un peu de guitare en essayant de plaquer des rythmes et accords latinos. Elle s'en sort plutot bien. Wayki la felicite alors qu'une touriste de Guayaquil insistait pour acheter un des bracelets qu'elle n'avait meme pas fini. Marie ne voulait pas le vendre, c'etait un prototype plein de fautes pour tester des nouveaux trucs. "Mais c'est du travail" repond Wayki, "ca vaut au moins 10 dollars, il faut que tu en demande 15, puis elle t'en demandera 10, tu en proposeras 14, et il partira peut-etre a 13. Tu pourras en faire d'autres plus tard" dit-il plein d'enthousiasme.

Marie apprend des nouvelles techniques pour faire des bracelets, pendant que Thomas recoud son pantalon


A cote de lui, Walter, un bonhomme assez important vendait lui aussi des bijoux, mais surtout des chapeaux de coco. Toujours le sourire aux levres, il avait un air et une presence rassurante, ainsi que toujours une boisson chaude ou un petit truc a grignoter a partager avec nous. J'ai moins eu l'occasion de connaitre les autres vendeurs.

Wayki, Fabian et Walter

Apres avoir tout range, deja tard dans la nuit, on va faire un grand feu pres de la cabane de Wayki avec tout le monde. On est bien, malgre la rosee on sort la guitare et le violon pour quelques chansons. Walter me parle de plein de chanteurs ispanophones qu'il aime bien, tout en entonant un air ou l'autre de sa voix grave et joviale en meme temps.

Deux prototypes de chapeaux de coco fabriques par Walter


On va dormir en meme temps que Wayki. Dans la penombre, a la lumiere d'une bougie, il me parle des bandits d'Equateur, de protection chamanique et de sa vie quand meme difficile du point de vue "plata" - argent. Je vais rejoindre Marie qui dort deja sous notre moustiquaire et j'ecoute pendant quelques instants seulement le bruit des vagues avant que je ne tombe moi aussi dans les bras de Morphee.

On s'active tard le lendemain. il faut dire que j'ai mis une heure a faire fonctionner mon "rocket stove" - rechaud artisanal - avant qu'il ne me serve a preparer mon precieux nectar corse.

Fabian qui essaye de se faire un cafe sur la plage avec son rocket stove


La meteo reste plutot mitigee. Marie et Wayki se payent mutuellement leurs verres, suite a leur pari de la veille. La journee se passe vite, et on se rend compte qu'il est deja trop tard pour partir a Puerto Lopez ce jour. Nous demandons donc a Wayki s'il peut nous heberger une nuit de plus dans sa cabane, ce qu'il accepte sans meme reflechir.

Le jour suivant, le soleil fit enfin son apparition pour de bon ! En meme temps qu'une masse impressionante de touristes, rendant les affaires un eu meilleures. D'un coup, Montañita prit un charme qui nous skotcha une journee de plus. Je me suis baigne pour la premiere fois dans le puissant ocean Pacifique, qui a cet endroit faisait des vagues de 2 metres de haut. C'est Wayki qui nous a propose une nuit de plus, etant donne qu'il devait se rendre egalement a Puerto Lopez assez tot le lendemain pour acheter des corails.